Le crypte aux trésors.

C’était une nuit d’Hallouine. Le vent froid et piquant soufflait par rafales dont l’intensité augmentait peu à peu. La terre était humide et les arbres dans la nuit glaciale paraissaient tous plus effrayants les uns que les autres.
C’était une nuit terrible. Une nuit où chaque être vivant s’étant retrouvé seul dans le cimetière des torturés aurait dû être traumatisé à vie. Heureusement, il n’y eut qu’une seule personne dans le cimetière des torturés, et ce n’était pas le genre à être traumatisé.

Cette personne était une sacrieuse. Elle tenait une beauté naturelle qui faisait que dans ses habits déchirés par les combats, elle était aussi séduisante que si elle avait porté des vêtements chics. Son regard était allumé d’une détermination sans limite, qui pourrait presque faire peur.
Sa tunique était si légère que n’importe quelle personne banale serait déjà mort de froid en la portant.
Son corps parfaitement équilibré était muni de jambes qui foulaient la terre du cimetière à une vitesse incroyable. Elle courait sans se lasser, sautant par dessus tous les obstacles qu’elle rencontrait, ne perdant pas de vue son but ultime. En cette nuit d’Hallouine, elle allait chercher le trésor tant recherché du cimetière des torturés.

On raconte qu’Hallouine lui même l’a dissimulé un jour dans une crypte et que seuls des aventuriers très courageux pourraient s’en emparer, uniquement pendant la nuit d’Hallouine.
Hanne Derhçone était de ces aventuriers intrépides. On raconte souvent qu’elle était plus brave qu’un féca qui recevait une piqûre de moskito sans ses boucliers, c’est dire.

Le trésor est dissimulé dans la crypte qui fait peur aux vampires. C’était ce que lui avait raconté son grand père qui était mort il y a peu de temps, alors qu’il menait des recherches effrénées dans l’espoir de découvrir ces richesses. Il n’y était jamais parvenu. Hanne aimait beaucoup son grand père, c’est pourquoi elle décida de continuer à mener des recherches.

Crypte de la mort… Non . Crypte du chafer d’élite… Non.

Hanne passa devant une bonne dizaine de cryptes au nom changeant mais qui n’avaient à chaque fois rien à voir avec des vampires. Soudain, Hanne s’arrêta. Elle l’avait aperçue.

La Crypte ereimul.

N’importe quelle personne trop excitée à l’idée de trouver la bonne crypte serait passé devant sans s’en rendre compte. Mais il suffisait d’inverser les lettres : ereimul…lumière. La lumière du jour était mortelle aux vampires. Hanne pénétra dans la crypte.

C’était une petite salle aux murs de pierre, faiblement éclairée. Hanne n’était pas mécontente de quitter la nuit glaciale pour cette petite crypte à la lueur des bougies magiques. Seulement, il n’y avait pas de trésor. Le sol comportait juste le crâne d’un aventurier mort de froid en cherchant le mystère de ce tombeau.

Hanne posa son genou au sol, puis son autre genou. Elle baissa son regard et ferma les yeux, se visualisant la pièce à l’intérieur d’elle même. La crypte était un petit bâtiment à quatre façades, il ne pouvait donc pas y avoir de passage secret dans le mur. C’était donc sûrement dans le sol. La sacrieuse se releva et inspecta le sol de pierre dans ses moindres recoins, la

moindre petite tache, le moindre petit défaut de fabrication… Rien. Rien ne laissait paraître la moindre trace d’un passage secret.

Elle parcouru donc les murs, à la recherche d’un indice, d’un signe, de n’importe quoi lui permettant de trouver ce maudit trésor. Au bout de deux heures, alors qu’elle commençait à désespérer, elle aperçut un petit défaut dans un bloc de pierre constituant le mur. Alors que la paroi était lisse, il semblait que la pierre était légèrement courbée vers l’extérieur de la crypte.

Hanne se retourna. Elle regagna la nuit glaciale en frissonnant. Le vent qui soufflait sur les tombes produisait un sifflement dérangeant, inquiétant. Elle s’attendait à voir surgir à n’importe quel moment un monstre sanguinaire qui la découperait en lambeaux. Elle marcha tout droit, toujours tout droit. Etrangement, aucun obstacle ne se présenta à elle, aucune tombe, aucun arbre… Juste une ligne droite, sans fin.

Soudain, Hanne vit enfin une autre crypte. Après avoir soigneusement inspecté les parois, elle se rendit compte que le défaut d’une pierre indiquait une direction. Hanne marcha dans cette direction, mais le problème c’est qu’il y avait le mur de la crypte en face. Elle tendit la main et… Elle passa au travers de la paroi.

Hanne Derhçone alla ainsi, de crypte en crypte, pendant une heure. Enfin, elle rencontra une tombe en travers de son chemin, ce qui n’était pas encore arrivé. Hanne interpréta donc qu’elle devait s’arrêter là. Elle examina la tombe pendant un temps indéfinissable. Enfin, elle distingua une bosse sur la pierre grise. Elle pressa cette bosse qui s’enfonça dans la tombe comme si elle appuyait sur de la pâte à modeler. Le sol trembla, ajoutant encore une note sinistre à la nuit terrifiante. La pierre tombale coulissa sur le coté, révélant un escalier qui descendait en ligne droite dans la pénombre souterraine. Hanne entra dans le caveau. Le changement d’atmosphère était flagrant, mais pas forcément appréciable. Le vent avait disparu, mais il faisait de plus en plus froid au fur et à mesure que l’on s’enfonçait dans le sol. L’air sentait la mort, le corps en décomposition… Et ce silence, ce silence rythmé uniquement par le « clap,clap » régulier des bottes de la jeune sacrieuse. Il régnait un climat malsain, effrayant. Un climat qui vous donne l’impression qu’il va vous arriver quelque chose de terrible.

Hanne vit le bout des escaliers qui paraissaient sans fin. Elle entra dans une pièce éclairée uniquement par de petits flambeaux, sur les murs des cotés. On n’en voyait pas l’extrémité. La jeune femme avança pendant de longues minutes. Enfin, elle parvint à la fin de la longue marche vers l’inconnu, cet inconnu qui vous saisit aux tripes, au moral. Cet inconnu qui fait tout pour vous dissuader d’avancer, cherchant au contraire à vous faire rebrousser chemin. Cet inconnu qui dans ce cas sentait la mort à vous faire vomir les restes de votre repas.

Quelqu’un était arrivé avant elle. Ce quelqu’un, un xelor aux bandelettes jaunies, était en train de se faire déchiqueter par un être horrible. C’était lui l’inconnu. C’était un corps en décomposition, un mélange entre un squelette et un zombie. Par endroits on voyait des os, à d’autres endroits, de la chair sanglante. En guise de tête, cet être portait une citwouille orange. Les trous percés pour les yeux et la bouche laissaient apercevoir de la chair jaune et malsaine.

A sa main, il brandissait une hache tachée de sang. Il n’émettait aucun son, juste un râle régulier dans lequel on percevait la colère et la cruauté. La hache s’abattit sur l’épaule de Hanne à une vitesse incroyable. Celle-ci poussa un hurlement qui déchira le silence du

tombeau. Le sang coulait le long de ses formes généreuses, tachant ses vêtements jusqu’au bas de sa hanche.
Une larme perla dans le coin de l’œil d’Hanne. Elle avait mal, affreusement mal. Tout à coup, elle fut prise de désespoir, sûrement un effet de l’abomination qu’elle tentait de combattre. Elle sentait que c’était la fin. Mais elle était incapable d’éprouver de la peur, c’était un sentiment inconnu pour elle. Hanne ne réagit même pas lorsque le monstre leva sa hache pour la seconde fois. Elle ferma les yeux, attendant juste la douleur atroce qu’elle allait ressentir au moment où la hache fracasserait son crâne pour atteindre son cerveau.

Le sifflement d’une lame fendant l’air résonna dans la crypte. On entendit aussi le son de la hache qui pénétrait la chair… Mais Hanne ne ressentit aucune douleur. Elle ouvrit les yeux. Devant elle, le xelor , sentant que c’était fini pour lui, dans un dernier souffle de vie, s’était interposé entre la sacrieuse et la hache meurtrière en brandissant son marteau qui avait sérieusement amoché la citwouille que le monstre portait en guise de chef. Celui-ci poussa un cri abominable, se tenant le visage entre ses doigts en décomposition. Sautant sur l’occasion, Hanne se saisit de sa dague qu’elle portait à sa ceinture et trancha la tête du monstre. La citwouille s’écrasa au sol. La créature se désintégra petit à petit, le cri terrible raisonnant encore de toute part. Soudain, le silence revint. Ce silence pesant, pénétrant, écrasant. Hanne déchira une partie de sa tunique, dévoilant son ventre, et la posa délicatement sur le visage du Xelor.

Elle vit, sur l’autel gardé par le monstre d’Hallouine, un petit coffre. Hanne l’ouvrit prudemment, il serait dommage de mourir après qu’un xelor se soit sacrifié pour elle.
Le coffre contenait un petit parchemin encore neuf, car jamais tenu en main par qui que ce soit. Il y était marqué ce petit message :

« Aucun trésor du monde n’égalera jamais la sagesse. Lis ce message et puis fais en ce que tu veux. Sache seulement qu’il t’est destiné et te rendra plus sage.

Le vrai courage, ce n’est pas ne pas avoir peur. C’est dominer sa peur.
Survivre grâce à quelqu’un, ce n’est pas de la chance. C’est de la bonté de sa part. »

Fin.